Quand le trône vacille pour des raisons médicales…

Les rois de France n’étaient pas des dieux. Derrière les couronnes et les tapisseries, bien des souverains ont souffert de maladies étranges, terrifiantes, parfois même grotesques. Certaines ont affecté leur règne, d'autres ont changé le cours de l'histoire. Voici le top 10 des pathologies royales les plus surprenantes, entre médecine et Histoire de France.

1. Charles VI, le roi fou (1380-1422)

Maladie : Psychose chronique, peut-être schizophrénie ou trouble bipolaire

Charles VI est l’un des cas psychiatriques les plus célèbres de l’histoire monarchique. En 1392, il commence à montrer des signes inquiétants : crises de violence, paranoïa, périodes de confusion, et surtout... il pense être fait de verre. Il refuse d’être touché, porte des vêtements renforcés et ordonne à ses domestiques de ne pas s’approcher trop brusquement.

Contexte médical : Les historiens hésitent entre schizophrénie, maladie maniaco-dépressive ou encéphalite d'origine infectieuse.
Contexte historique : Cette folie laissa le royaume entre les mains des grands féodaux et contribua à la guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons.

Source : Jean Favier, La Guerre de Cent Ans, Fayard, 1980.

2. Charles VIII et la porte meurtrière (1483-1498)

Maladie : Traumatisme crânien mortel après un choc

Le 7 avril 1498, Charles VIII meurt de manière aussi soudaine qu’absurde. En se rendant au jeu de paume au château d'Amboise, il heurte de plein fouet le linteau d'une porte basse. Quelques heures plus tard, il est mort.

Contexte médical : Hématome intracrânien probable.
Contexte historique : Sa mort sans héritier direct entraîne l’avènement de la maison de Valois-Orléans avec Louis XII.

Source : Didier Le Fur, Charles VIII, Perrin, 2006.

3. Henri III et la mélancolie étrange (1574-1589)

Maladie : Troubles psychosomatiques, neurasthénie

Henri III était obsédé par son apparence, passait des heures à se parfumer, et faisait dormir des chiens sur son lit. Mais derrière cette coquetterie se cache une instabilité psychique et une profonde mélancolie. Il souffrait probablement de ce qu'on appellerait aujourd'hui un trouble anxieux ou une dépression chronique.

Contexte médical : Symptômes de neurasthénie ou de trouble obsessionnel.
Contexte historique : Son comportement jugé efféminé et excentrique nourrira la haine des Ligueurs, précipitant son assassinat.

Source : Jean-Christian Petitfils, Henri III, Perrin, 2008.

4. François II et la maladie des oreilles (1559-1560)

Maladie : Otite chronique et abcès cérébral

Le jeune roi François II, époux de Marie Stuart, meurt à 16 ans. Sa santé était fragile et son état se dégrade rapidement à cause d'une infection de l'oreille. Il s'agit probablement d’une otite interne non soignée qui dégénère en abcès au cerveau.

Contexte médical : Mastoïdite menant à un abcès intracrânien.
Contexte historique : Sa mort ouvre la régence de Catherine de Médicis et favorise les tensions religieuses entre catholiques et protestants.

Source : Robert J. Knecht, The French Wars of Religion, 1559–1598, Routledge, 2014.

5. Louis XIV et l’anus royal (1643-1715)

Maladie : Fistule anale

Le Roi-Soleil souffrit d'une fistule anale à la fin des années 1680, un mal très douloureux. Une opération chirurgicale innovante (et risquée) est réalisée par le chirurgien Félix. Ce dernier inventa même un outil spécial : le bistouri courbe "royal". L’intervention est un succès et renforce la légende de Louis XIV.

Contexte médical : Fistule anorectale nécessitant incision et drainage.
Contexte historique : L'opération réussie devint un événement politique — elle justifia le pouvoir absolu, presque divin, du roi.

Source : Stanis Perez, La santé de Louis XIV, Champ Vallon, 2007.

6. Charles II le Chauve et la calvitie, mais pas que (840-877)

Maladie : Épilepsie probable

Surnommé "le Chauve", Charles II aurait souffert de crises soudaines ressemblant à de l’épilepsie. Des témoignages rapportent des pertes de connaissance et des convulsions. On parlait à l’époque de possession ou de châtiment divin.

Contexte médical : Épilepsie partielle, peut-être liée à une lésion cérébrale ou à une cause génétique.
Contexte historique : Sa fragilité physique n’empêcha pas son ambition, mais elle fut utilisée contre lui par ses adversaires.

Source : Régine Le Jan, Famille et pouvoir dans le monde franc, Publications de la Sorbonne, 2003.

7. Henri IV et la mauvaise odeur (1589-1610)

Maladie : Probablement une infection chronique ORL ou dentaire

Le Vert-Galant sentait mauvais, selon plusieurs contemporains, au point que ses dames de compagnie s’en plaignaient. Cela pourrait venir d’une sinusite chronique, d’une infection dentaire mal soignée ou d’un problème de peau.

Contexte médical : Halitose (mauvaise haleine), potentiellement liée à une parodontite ou une carie purulente.
Contexte historique : Cela ne nuisit pas à son charme politique, mais illustre la condition sanitaire des puissants.

Source : Jean-Christian Petitfils, Henri IV, Perrin, 2009.

8. Philippe V et la "maladie des fièvres" (1316-1322)

Maladie : Tuberculose ou paludisme

Philippe V meurt jeune, à 28 ans, après des accès répétés de fièvre. Certains parlent d’une "fièvre hectique", terme médiéval pour désigner des affections longues et mortelles, comme la tuberculose ou le paludisme.

Contexte médical : Tuberculose pulmonaire ou paludisme, les deux étant endémiques à l’époque.
Contexte historique : Sa mort précoce laisse la place à son frère Charles IV, dernier des Capétiens directs.

Source : Georges Duby, Le temps des cathédrales, Gallimard, 1976.

9. Louis XI et l’hypocondrie royale (1461-1483)

Maladie : Hypocondrie, peut-être névrose paranoïaque

Louis XI est connu pour sa peur maladive de la maladie. Il vit entouré de médecins, fuit les villes, multiplie les cures. Il porte des reliques et prie constamment pour sa santé.

Contexte médical : Hypocondrie, potentiellement associée à un trouble anxieux sévère.
Contexte historique : Cette angoisse n’empêcha pas une gouvernance efficace, mais influença sa manière de régner, repliée et centralisée.

Source : Paul Murray Kendall, Louis XI: The Universal Spider, Norton, 1971.

10. Louis XV et la petite vérole (1774)

Maladie : Variole (petite vérole)

Louis XV meurt dans d’atroces souffrances à Versailles de la variole, maladie hautement contagieuse. Son corps, couvert de pustules, est évacué en cachette tant il inspire la terreur. Il fut l’un des derniers rois morts de cette maladie avant que la vaccination ne se généralise.

Contexte médical : Variole majeure, très virulente et souvent mortelle.
Contexte historique : Sa mort précipite l’avènement du jeune Louis XVI, sans réelle préparation au pouvoir.

Source : Michel Antoine, Louis XV, Fayard, 1989.

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